Maîtrise de conso tabac

Fumer comment ça a commencé ? Et l’envie de maîtriser voire d’arrêter elle est venue d’où ?

Fumer déjà j’avais essayé à 8 ans en cachette, là je me suis fait engueuler et plus d’ailleurs. Puis j’ai commencé à fumer réellement j’avais quinze ans. Je piquais une cigarette par jour à ma mère et je taxais. Après au fur et mesure je me suis mis à fumer plus et plus souvent.

L’envie d’arrêter c’est venu de plein de choses qui ont commencé à me dégouter au fur et à mesure du temps, par exemple l’odeur des cendres du tabac froid, chez moi, dans des bureaux, chez les autres, partout en fait. De vraiment plus supporter l’odeur de la cigarette ça amène le dégoût par exemple quand tu l’éteins avant de rentrer dans le bus pour la rallumer plus tard… ça pue. Dans ton paquet ou dans ta poche et en fait partout autour et ça reste sur les vêtements, dans ton nez ça reste aussi. Quand tu fumes trop tu ne t’en rends plus compte forcément mais si t’aères ton nez après tu t’en rends compte (rires).

La cigarette c’est aussi par rapport à l’argent. Quand t’as pas de thunes ça t’oblige à demander à tout le monde et se prendre des râteaux ça aide pas.

Aussi des fois j’ai même failli tomber dans les pommes tellement ça me donnait la nausée. Quand je faisais mes démarches administratives avec la chaleur dans la rue sans avoir mangé ça me donnait le vertige. Comme quand tu fumes au début les premières fois ça peut te retourner la tête, l’estomac, les deux, surtout quand t’as pas mangé. Ça veut bien dire que ça peut te mettre dans des états désagréables et avoir envie de vomir. Moi j’aime pas vomir franchement c’est déjà assez dur quand t’es malade vomir (rires).

Aussi ça m’a aidée de faire un boulot intense sur le plan physique qui fait que tu n’as pas le temps de fumer. Quand tu fais le ménage dans les chambres des hôtels tu enchaînes. Tu fumes quand t’as le temps, pas souvent. Et avec les temps de formation aussi, les temps en cours tu fumes pas et t’es fatiguée par les cours alors t’as moins le temps d’y penser.
En fait je crois que mon corps n’a plus envie, j’ai 47 ans et il m’envoie plein de signes. Le pilon non plus j’ai plus envie d’en fumer. L’alcool j’essaye que ce soit seulement quand je suis contente, je m’achète une petite bouteille de blanc mais je ne bois plus comme avant.

Maintenant que j’ai mon Smartphone et un ordi alors je peux écouter de la musique et être bien chez moi. J’ai envie d’y être. Je danse, je réécoute plein de morceaux, je re-danse devant la glace comme une folle (rires). La dernière fois je me suis fait une petite fête toute seule. Je rigole. Et aussi j’arrive à remettre ma bouteille dans le frigo… Pas tout boire… Tu vois ça change tout… Pas se mettre totalement le compte et après pas être bien. C’est une étape… boire un verre en mangeant et pas en mangeant pas ! Avec la cigarette c’est aussi pas forcément en fumer une après chaque repas. Petit à petit après je n’en ai même plus envie.

Justement si on parlait stratégies ?

Ah j’en ai plein des stratégies (rires) :
-Ne pas prendre mon tabac ou me faire de cigarettes quand je vais en ville.
-Pas avoir de thunes (rires) parce que comme j’ai pas de thunes j’achète du tabac pas cher, du tabac à pipe tu vois qui n’est vraiment pas bon du tout en fait, il coûte 6 euros mais j’ai pas trop envie de le fumer du tout alors ça m’enlève l’envie. C’est tellement écœurant.
-Le fait d’éteindre une cigarette pas finie le soir pour en garder pour le matin. Quand tu la rallumes tu captes à quel point c’est dégueu et j’ai pris conscience que la fumée me dérangeait vraiment.
-Changer des habitudes, quand tu travailles pas c’est plus dur parce que t’as plus de temps pour y penser. Faut faire des trucs, des activités. Rester trop enfermée ça rend fou.
-En parler, j’en ai parlé à ma sœur, j’vous en ai parlé, ça a fait du chemin dans ma tête. J’ai la tête dure alors des fois ça m’aide à faire les choses d’un coup avec ma motivation, mais aussi d’autres fois ça me fait pas bouger et quand ça fait ça, faut que j’en parle parce que ça me motive d’échanger pour pas rester bloquée là où je veux pas. C’est clair ou pas vraiment clair ce que je veux dire ?

Si si c’est clair. Et la maîtrise a créé des satisfactions ?  

Je me suis rendu compte que je retrouvais une harmonie… Parce qu’arrêter, enfin presque arrêter de fumer, ça tape sur les nerfs aussi, ça fait vriller à des moments… Du coup c’est pour ça que je fais du vélo aussi, je le sens que je retrouve du souffle. C’est important de se sentir mieux, de sentir que ça a des effets positifs qui font retrouver des sensations. C’est vrai aussi pour le goût de la nourriture.

Sentir aussi l’envie qui s’en va car même l’envie de fumer elle part… Des fois j’en ai envie je résiste, des fois je fume, mais même quand je fume après j’aime pas… J’en suis là ! Quand t’en as marre, t’en as marre en fait… Marre de m’intoxiquer et rien y faire. Alors je suis contente de m’en occuper de réduire et enlever des consos. Voilà ! Moi le pilon comme le tabac j’en ai eu marre comme des trucs dont t’as fait le tour et qui ont plus de défauts que de qualités au final, même si peut-être à un autre moment dans ma vie c’était différent ou je me posais même pas la question. J’me transformais trop du côté sauvage des fois (rires) ou éclatée. Plus vouloir être dépendante ça a été déclencheur. C’est une bonne chose de changer. J’ai déjà atteint le summum de l’énervement, du ruminement, de la colère, du vrillage à des moments de ma vie qui me dépassent alors là réfléchir, maîtriser mes consos et ce qu’elles déclenchent ça me fait du bien en vrai, c’est pas comme si j’étais obligée, c’est moi qui décide avant d’attendre d’avoir un super grave problème de santé. Maintenant ça m’arrive même d’allumer une clope puis la jeter. Y en a ça les fait marronner que tu la gâches mais en fait c’est tout gagné pour moi ce que je fume pas.

Et y a-t-il eu d’autres éléments déclencheurs pour stimuler la réduction voire l’arrêt de certaines consos ?

Oui par exemple quand j’entends ceux qui te racontent leurs cancers, leurs problèmes de poumons ou quoi ça me fait mal au cœur, ça me touche. Tout ça, ça me fait peur. J’me dis… nan, c’est trop triste de voir l’état de proches, très proches et malades. J’me dis j’ai beaucoup fumé, il est temps d’arrêter. La santé c’est important, 47 ! J’ai 47 ans en vrai ! Faut qu’j’arrête.
J’en ai vu plein sombrer dans leurs addictions, je sais ce que c’est d’être en galère, de plus savoir vers où aller, de demander du soutien pour changer sa situation. Faut parler.
Les consos et diminuer ou arrêter ça dépend des gens mais en fonction de comment tu es sociable ou posée et comment tu changes des trucs du quotidien ça compte pour y arriver ou pas. Si tout le monde fume autour de toi ça t’aide pas, des fois faut changer d’environnement ou s’isoler plus… Pareil pour l’alcool si t’es tout le temps avec des gens au bar c’est pas facile de pas boire, etc …
Je sors dix mille fois moins qu’il y a 10 ans par exemple. J’ai mon appart’, j’arrive à peu près à gérer mon budget, j’ai un ordi, j’ai de quoi faire mes démarches CAF, Pôle emploi et autres. Maintenant j’vais à la balnéothérapie mais pas le soir dans les bars (rires). C’est vrai en fait j’ai déjà changé. Je m’entoure pas toujours des bonnes personnes, mais y a toujours eu des bonnes personnes autour de moi (rires).

Quelque chose à ajouter ?

Y a des choses qui seront toujours dures mais franchement faut pas se laisser faire par tout c’qui nous fait du mal en fait. Moi j’suis une guerrière… Et ça peut avoir des côtés « trop » en fait quand c’est juste parce que tu te rends dingue avec tout surtout contre tout ce qui t’énerve…

J’ai avancé ces dernières années, bon avec des hauts et des bas quand même hein. J’me mets moins le compte même presque plus du tout dans les états qui me font vriller. L’alcool ça joue des tours et ça fait vriller plein de gens. Le tabac, c’est que ça rend malade en fait… Et surtout j’ai pas envie d’être dépendante toute ma vie. Faut changer. Comme je suis une « énervée » alors là maîtriser c’est positif.

Interview de « La Salida » par Jihane El Meddeb