Depuis septembre 2020 nous intervenons lors d’ateliers au CHRS (Centre d’Hébergement et de Réadaptation Sociale) Forbin de la fondation saint Jean de dieu, à Marseille. Lieu d’hébergement pouvant accueillir au maximum 300 personnes, uniquement des hommes. Nous présentons la revue aux curieux, la distribuons et proposons un atleir en accès livre et continu sur une durée de 2 heures par séance. Le confinement n’a pas empêché nos interventions même si nous devons adapter l’installation aux problématiques sanitaires liées à la covid-19.
Création d’Affiches ? écriture journalistique ? Poème ? témoignage ? Dessin ? collage ? interviews ?
Une diversité d’outils sont à disposition pour créer et partager des opinions, des conseils, des constats, des vécus, des expertises, des questions ! Ces outils permettent à chacun-e d’aller-vers ce qui lui plait ou lui parait plus pertinent en fonction de ses idées. Les techniques sont mixées par les participants en fonction de leurs envies d’écriture, de dessins, collages et enregistrements. Chacun reste le temps qu’il veut. Nous aidons ceux qui le demande à orthographier, traduire dans la mesure de nos capacités, enregistrer, discutons de la revue et au delà. Ces temps d’ateliers SaNg d’EnCRe à Forbin, sous le signe d’un accueil chaleureux par les participants et l’équipe sur place sont devenus réguliers en depuis le début de l’automne 2020. Etant donné la dynamique de collaboration qualitative qui s’est instaurée, une exposition sera installée par l’équipe SaNg d’EnCRe en décembre 2020 au sein du CHRS.
Jihane El Meddeb et Johanna Martins, équipe SaNg d’EnCRe, association Nouvelle Aube.
Quelques textes et dessins issus des ateliers :
ça m’travaille le cerveau ce COVID. Ces masques servent-ils vraiment. Pourquoi changent-ils d’avis tout le temps. Ca profite à qui ? Il y a beaucoup d’intérêt économique non ? Le masque ça rend nerveux. Moins d’oxygène. Moins de globules blancs. ça c’est des questions… je trouve pas de réponses. Et le stress, ça rend malade ! Comment on va faire pour s’en sortir, économiquement ? Je sais pas…Le monde se referme sur soi-même. On peut s’en sortir, mais qui en a la volonté ?
Mohamed SAHARI
Mémoire de ma vie :
Je m’appelle Sadio-Harouna Sissoko, d’origine malienne précisément dans la région de Kidal. J’ai vécu beaucoup de pays avant d’arriver en France ici. Je suis parti de mon pays d’origine, c’était le 28 octobre 2015, je suis passé par le Burkina, le Niger, l’Algérie, la Lybie, l’Italie et la France. Je suis avec vous, en France environ depuis 1 mois. Depuis le 30 Septembre 2020 jusqu’à aujourd’hui je n’ai pas eu de difficultés, seulement au début c’était un peu difficile. Mais de toute façon moi avec les français nous établirons ensemble la vie et le bonheur. Moi Sadio-Harouna Sissoko, né le 12 novembre 1999 à Kidal je suis une goutte d’eau dans l’océan et si cette goutte n’existait pas elle manquerait. Enfin je suis très heureux d’être parmi vous aujourd’hui et je remercie les autorités françaises mais j’attends la réponse de l’OFII à Marseille.
Sadio-Harouna SISSOKO
Je vais écrire une expérience personnelle que je voudrais passée à la jeunesse. Je l’ai vécu moi-même, donc je voudrais passer un message : quand j’étais jeune j’ai grandi dans la violence, dès mon jeune âge j’ai fait connaissance des criminels. Ca commence avec des petits délits puis plus tard j’ai fait parti d’une famille de crime organisé et oui c’était joli vous avez tout plein d’argent des belles femmes, du pouvoir, des voitures de luxe extrêmement chères. Vous avez le sentiment d’être intouchable. Ils vous donnent le sentiment que vous êtes supérieurs sur tout le monde, incluant l’autorité, mais il y a le revers de la médaille, vous avez des manières de finir primo mort ou en prison donc un bon conseil, restez dans le droit chemin, allez à l’école, apprenez un métier et travaillez et gagnez votre argent honnêtement. Je parle de ma propre expérience… Et pensez au revers de la médaille ! C’est le seul conseil que je peux vous donner. Profitez de la vie mais honnêtement. La vie est très belle.
MONTE-CHRISTO
Quand on sait qu’on va finir dehors on se mets à boire et une fois à la rue c’est le pire . C’est ma maladie qui m’a amené à la rue. Un peu comme un condamné à mort qui ne croit pas qu’il va mourir jusqu’à l’injection mortelle. Les consommations s’amplifient, les états seconds aussi. Ça commence avant, à la maison, je savais que ça allait déraper, confinement, isolement, plus de travail, des frais à payer, le cercle infernal et finalement quand on perd son logement ça soulage quelque part, ça de moins à gérer, c’est ce que je ressens.
TAOBY
Au mois de mars je suis rentré à l’hôpital de Martigues car j’ai eu le COVID, je n’avais pas de revenus j’ai été confiné rue Estelle un mois et comme je n’ai pas d’appartement je suis arrivé à Forbin juste avant le confinement. J’ai été malade beaucoup et je suis allé encore à l’hôpital puis je suis revenu à Forbin. Ici je dis bonjour à tout le monde, je veux pas être prétentieux, je discute pas trop mais un peu. J’ai fait le dossier pour la sécu ici.
Ici Charlotte elle m’a aidé à faire plein de papiers, soigner ma hernie discale. J’ai les genoux qui se tordent et je vais me faire opérer de la cataracte. Ici j’ai moins mal partout qu’avant mais je vais pas vivre toute ma vie ici. Retourner à l’Estaque ce serait trop cher, et mes parents ne veulent pas de moi là bas. Maintenant même si c’est ailleurs je voudrais un logement. Il faudrait que j’ouvre un compte bancaire et comme j’ai perdu tout mes papiers dont ma carte de séjour il faut que je recommence tout. Pour la sécu ça va j’ai l’attestation. Ce matin j’ai été au commissariat pour faire ma déclaration mais celui devant il m’a pas laissé entrer il m’a dit que tout se faisait sur internet froidement. Alors que moi j’ai une canne, mes jambes, j’en ai une qui morfle et l’autre je la traine. Je m’appuie sur la jambe droite pour trainer la gauche dont le genou est fatigué.
Malik NEZZAR
C’est une longue histoire
Dans ma vie, j’ai fait des études. J’ai un bac +3 en Algérie …
En 1998 je suis arrivé en France, beaucoup de problèmes neurologiques à cette époque. J’ai été opéré aussi des 2 genoux. J’ai toujours vécu à Marseille depuis que je suis en France.
Ici ça ressemble à Oran. C’est la1ère fois de ma vie que je me retrouvais en centre d’hébergement d’urgence en Mars 2020. Pendant le confinement j’ai été hospitalisé. J’ai été opéré d’une tumeur au cerveau. J’ai des séquelles psychologiques, des traitements pour le stress aussi…
Ici je suis soigné. L’hôpital c’est obligé pour moi.
Avec l’Algérie il y a une rupture stratégique je dis, la rupture familiale. Au CHRS j’ai trouvé un environnement qui est accueillant et Alexandre m’accompagne sur la recherche d’un logement, un appartement, un studio, avec une cuisine… J’ai obtenu normalement un T2 à Allauch mais à cause des confinements on ne peut pas visiter. Fin Mars ils me recontacte pour visiter l’appartement…
Tout d’un coup là je regarde comment tu écris les mots que je dis sur le papier et j’aimerais écrire, écrire comme ça en français parce qu’aussi j’aime la lecture. Je lis et j’écris en arabe mais je ne suis pas bilingue en français, j’écris juste un peu l’espagnol. Je vais aller à un rendez-vous là à 16h mais je reviendrai te parler.
Mots à l’oral d’Abdelhak AMOKRANE, 61 ans, écrits par Jihane El Meddeb en atelier.
